Les platanes de la Commanderie

Les platanes de la cour d’honneur de la Commanderie de Rixheim sont aussi remarquables que l’architecture qui les entoure. Ce sont aussi les spectateurs de plusieurs siècles d’histoire.

Construite entre 1735 et 1745 et aujourd’hui propriété de la Ville, la Commanderie de l’Ordre des Chevaliers Teutoniques est à l’époque un bâtiment servant essentiellement au prestige de l’Ordre.

Après la Révolution, elle connait une véritable métamorphose de ses fonctions. Si elle conserve son prestige, elle devient surtout le cœur d’une activité économique avec son rachat par un fabricant de papier-peint auquel Jean Zuber s’associe avant d’en devenir l’unique propriétaire en 1802. Il participe ensuite à la renommée grandissante de la manufacture au cours du XIXe siècle. La famille Zuber transforme également le parc de 2 hectares, situé à l’arrière des bâtiments, en un jardin aménagé à l’anglaise.

Si elle abrite toujours la manufacture de papiers-peints Zuber & Cie, la Commanderie partage aujourd’hui ses locaux avec le Musée du papier-peint et l’Hôtel de Ville.

Quant aux platanes, on raconte que c’est en 1807, après la bataille d’Iéna, que l’industriel aurait décidé d’en planter six pour célébrer la victoire de Napoléon.

Plus d’un siècle plus tard, leur existence se trouve cependant compromise par la guerre. En 1944, la Commanderie est alors utilisée comme caserne par les troupes françaises et les températures hivernales font planer sur les arbres la menace de finir en combustible de chauffage. Heureusement pour eux, ils échappent à ce sort et ce sont finalement des planches d’impression de la manufacture qui sont brûlées. Depuis, les platanes profitent d’une vie plus paisible.

Il faut dire que la nature les a plutôt bien armés pour faire face aux menaces. A moins d’être emporté par des parasites ou des maladies, le platane est une essence qui résiste très bien à l’environnement urbain. Il supporte non seulement la pollution mais aussi le gel et les entretiens répétés, même si ces derniers ne sont pas toujours très soignés. De plus, il pousse rapidement et droit, ce qui en fait un excellent arbre d’alignement ou d’ornement, à l’image de l’ensemble présent dans la cour d’honneur. Pour toutes ces raisons, il n’est pas rare qu’il borde les boulevards et routes nationales. Enfin, il apporte de la fraicheur grâce à un ombrage important.

Cette dernière qualité devient d’autant plus appréciable avec l’accélération du changement climatique qui constituera peut-être une nouvelle épreuve pour ces arbres dont l’espérance de vie peut atteindre 1000 ans.

Les arbres de la Commanderie sont des platanes communs. Cette essence est un hybride, résultat d’un croisement entre Platanus occidentalis, un grand arbre feuillu d’Amérique du Nord, et Platanus orientalis qui pousse naturellement dans les Balkans et en Asie. Ses feuilles de grande taille et d’un vert assez vif sont découpées en lobes pointus. D’une forme rappelant les feuilles de l’érable plane, cette caractéristique lui vaut de porter également le nom de platane à feuilles d’érable.

Outre leurs qualités paysagères, les platanes de la cour sont aussi des hôtes de choix pour la faune. Un des troncs présente une cavité qui a abrité pendant une dizaine d’années un couple de chouettes hulottes. Les arbres bicentenaires ont ainsi vu naitre chaque année deux à trois bébés chouettes.

Le tronc du platane recèle d’autres secrets. Tous les ans, l’écorce verdâtre s’en détache sous forme de plaques. Le tronc se retrouve ainsi paré de plages colorées évoquant vaguement le motif d’une tenue de camouflage. Ces « écailles », si caractéristiques du platane, cachent une biodiversité riche, plus encore en hiver. En effet, à la saison froide, insectes et autres petits animaux vivant habituellement dans le houppier descendent sur le tronc. D’autres, normalement absents du platane, viennent également y trouver refuge.

Outre leur âge et leur histoire, les dimensions des platanes de la Commanderie imposent, elles aussi, le respect : entre 25 et 30 mètres de hauteur et une circonférence du tronc dépassant les 3,40 mètres.

Tous ces trésors méritaient bien d’être protégés. C’est donc pour valoriser et préserver ces arbres impressionnants tant par leur taille que par la vie qu’ils abritent que la Ville de Rixheim a déposé une demande de labellisation comme « arbres remarquables de France » auprès de l’association A.R.B.R.E.S. Attribué aux sujets dont les caractéristiques sont exceptionnelles, les platanes de la Commanderie semblaient parfaitement correspondre au cahier des charges.

La commission de labellisation de l’association a donné une suite favorable à la demande en attribuant le label « ensemble arboré remarquable ». Liées par une convention, la Ville et l’association s’engagent à mettre en valeur ces arbres et à tout faire pour les préserver. Un panneau de présentation sera d’ailleurs prochainement installé sur le site.

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